COUR FÉDÉRALE
Déraisonnable a été jugée l’approbation d’un produit à base de glyphosate

TORONTO | Territoires traditionnels de plusieurs Premières Nations dont les Premières Nations des Traités Williams, les Hurons-Wendats, les Anishnaabeg, les Haudenosaunee, les Chippewas, et les Mississaugas de Credit, le jeudi 20 février 2025 – Des groupes environnementaux et du domaine de la santé célèbrent une récente décision prise par la Cour fédérale qui a jugé déraisonnable la décision d’approuver l’herbicide à base de glyphosate Mad Dog Plus, une décision prise par Santé Canada en 2022.
Dans leur contestation judiciaire, les groupes ont fait valoir que l’organisme de réglementation fédéral n’avait pas effectué une évaluation scientifique rigoureuse et à jour du glyphosate avant de renouveler le produit, malgré de nouvelles preuves de risque pour la santé humaine et pour l’environnement. À titre de rappel, le glyphosate est l’herbicide le plus utilisé au Canada et il est également le principal produit chimique présent dans de nombreux produits, dont le Roundup.
En 2022, le renouvellement de pesticide à base de glyphosate a été accordé sans tenir compte des nouvelles données scientifiques sur ses potentiels risques
L’affaire a été portée par les Amis de la Terre Canada, la Fondation David Suzuki, Safe Food Matters et Environmental Defence Canada, représentés par des avocat.e.s d’Ecojustice.
Depuis la dernière évaluation du glyphosate par Santé Canada en 2017, de nouvelles données scientifiques publiées ont établi un lien entre les produits finis à base de glyphosate et les cancers, les maladies métaboliques, la toxicité neurodégénérative et reproductive et les dommages aux écosystèmes. En décembre 2022, Santé Canada a renouvelé Mad Dog Plus sans mettre à jour son évaluation sur les risques du glyphosate, en omettant les preuves de risque plus récentes.
Dans sa décision, la Cour a souligné que les conclusions de Santé Canada en 2022, affirmant que les produits antiparasitaires à base de glyphosate présentaient des risques acceptables, n’étaient appuyées par aucune analyse scientifique. En conséquence, elle a remis à Santé Canada la demande de renouvellement pour Mad Dog Plus et accordé à Santé Canada un délai de six mois pour revoir sa décision en s’appuyant de manière transparente sur les nouvelles données scientifiques concernant les risques associés au glyphosate.
Après l’audience de contrôle judiciaire, une demande d’accès à l’information a révélé que Santé Canada avait prévu examiner les nouvelles données scientifiques sur le glyphosate en 2022. Cependant, Santé Canada a procédé au renouvellement des approbations des produits à base de glyphosate sans avoir réalisé cet examen. L’examen prévu n’a pas été divulgué au tribunal ni au public.
L’utilisation du glyphosate est très courante au Canada. Chaque année, plus de 50 millions de kilogrammes sont répandus sur les aliments et les forêts, un chiffre alarmant. L’utilisation de pesticides toxiques comme le glyphosate est en hausse au Canada. Un nouveau rapport d’Ecojustice révèle que le Canada est désormais le cinquième plus grand utilisateur de pesticides au monde, avec des ventes en hausse de 47 % en seulement une décennie. Ces pesticides présentent des risques pour la santé humaine et l’environnement.
« La loi exige que Santé Canada ait une compréhension complète des impacts potentiels que les pesticides dangereux, comme le glyphosate, pourraient avoir sur la santé des personnes et l’environnement avant d’autoriser leur vente et leur utilisation au Canada. Malgré cela, Santé Canada a accordé des renouvellements pour Mad Dog Plus en 2022, un herbicide à base de glyphosate, sans une évaluation transparente des nouvelles données scientifiques sur les risques posés par le produit chimique — Laura Bowman, avocate chez Ecojustice. Cette décision de la Cour fédérale confirme que Santé Canada doit tenir à jour les connaissances scientifiques sur les risques liés aux pesticides afin de protéger la santé humaine et l’environnement. »
« Il est évident que le renouvellement automatique des autorisations de mise sur le marché des pesticides, sans tenir compte des nouvelles données scientifiques sur les risques pour l’environnement et la santé, est déraisonnable. La Cour elle-même en a convenu. Le gouvernement doit investir dans le renforcement de la surveillance des risques liés aux pesticides, à commencer par le glyphosate. Il n’a jamais été aussi important de protéger la crédibilité du système canadien de réglementation des pesticides — Lisa Gue, responsable de la politique nationale à la Fondation David Suzuki. L’utilisation excessive de pesticides, comme le glyphosate, contribue au déclin de plusieurs espèces, dont le papillon monarque, une espèce menacée. À la lumière de la décision du tribunal, L’ARLA devrait évaluer les nouvelles données scientifiques des effets sur les espèces en péril lorsqu’elle réexaminera le renouvellement de ces produits. »
« Quand Santé Canada ne fait pas son travail d’évaluation des pesticides correctement, ce sont des personnes qui sont exposées à des produits dangereux et qui tombent malades – particulièrement les agriculteur.rice.s qui en sont les premières victimes. — Thibault Rehn, coordonnateur de Vigilance OGM »
« Lors du renouvellement d’un produit, Santé Canada ne peut plus se fier à d’anciennes évaluations ni s’assurer que « faites-nous confiance, nous avons fait ce qu’il fallait ». Dans notre affaire de 2022, la Cour d’appel fédérale a clairement indiqué qu’une justification est requise. Fait significatif, cette affaire ajoute qu’une justification est requise aux points de contrôle réguliers, comme les renouvellements de cinq ans. Une déférence aveugle à l’égard de Santé Canada à n’importe quelle étape du cycle de vie d’un pesticide n’est plus justifiée » — Mary Lou McDonald, présidente de Safe Food Matters
« La science montre que les pesticides sont mauvais pour les êtres humains, les pollinisateurs, les sols et l’eau. Depuis bien trop longtemps, notre gouvernement fédéral s’enivre de la technologie agricole et approuve et renouvelle des pesticides aux conséquences néfastes. Nos cultures, nos forêts et nos espaces verts ont besoin de solutions plus sûres qui n’entraînent pas de résistance perverse aux parasites, et nos travailleurs agricoles et leurs communautés ont besoin d’un leadership fédéral pour les protéger des maladies liées aux pesticides. » — Cassie Barker, responsable principale du programme sur les substances toxiques chez Environmental Defence
« La décision de la Cour a le potentiel d’imposer un nouveau niveau de transparence dans l’évaluation des risques liés aux pesticides et des évaluations plus rapides de ces risques. L’ARLA doit mettre en place un système de réglementation solide et transparent pour garantir que les Canadien.ne.s ne soient pas exposé.e.s à des pesticides hautement toxiques contenus dans les 7 700 produits approuvés contenant des pesticides comme ingrédients actifs. Ce n’est pas le moment de céder à la pression de l’industrie pour mettre un terme à de nouvelles mesures importantes comme la surveillance continue des résultats scientifiques. Il est plutôt temps d’obtenir les nouvelles ressources nécessaires pour accélérer l’adoption de ces nouvelles mesures transparentes. » — Beatrice Olivastri, PDG des Amis de la Terre Canada
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Contexte
En comparaison aux autres pays, le Canada est à la traîne en matière de gestion des pesticides à risque
Le Canada est le cinquième plus grand utilisateur de pesticides au monde, et l’utilisation de ces produits et les coûts qu’ils entraînent pour les agriculteur.rice.s continuent d’augmenter (rapport en anglais). Le Canada doit faire de la réduction de l’utilisation des pesticides une priorité politique claire et s’aligner sur les meilleures pratiques internationales pour mieux protéger les populations et l’environnement. Le Canada continue d’être à la traîne par rapport à d’autres pays dans la gestion des risques posés par ces produits chimiques.
Le Canada utilise des millions de kilos de pesticides interdits en Europe, qui sont associés à de graves effets sur la santé et l’environnement. L’utilisation excessive et la mauvaise réglementation des pesticides posent de graves risques commerciaux pour le Canada, alors que l’Union européenne s’apprête à restreindre les importations de produits alimentaires contenant des pesticides interdits ou des pesticides utilisés à des taux plus élevés qu’en Europe (source en anglais).
Le Canada est à la traîne par rapport à l’Europe et à d’autres partenaires commerciaux comme l’Europe et le Mexique en ce qui concerne la restriction de l’utilisation d’herbicides à base de glyphosate pour protéger la santé humaine et l’environnement. L’Europe interdit les pesticides dangereux qui peuvent contaminer les aliments et l’eau potable, tandis que le Canada continue d’autoriser une utilisation importante de ces produits chimiques.
La gestion des pesticides au Canada subit l’influence indue de l’industrie
Les dommages inacceptables et inutiles causés par les pesticides sont le résultat d’un système de réglementation défaillant qui a été accaparé par l’industrie. Le Canada adopte une approche fondée sur le marché qui permet aux multinationales agrochimiques d’exercer un contrôle sur le secteur agricole. En conséquence, ces entreprises engrangent des milliards de dollars de profits au détriment des agriculteur.rice.s, des travailleur.euse.s, de notre santé et de notre environnement.
Les entreprises paient des frais aussi bas que 90 $ pour renouveler l’homologation de produits antiparasitaires qui présentent des risques émergents pour la santé et l’environnement. Santé Canada doit utiliser un système de pollueur-payeur pour s’assurer de pouvoir se tenir au courant des dernières avancées scientifiques.
À propos
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