5- Politique bioalimentaire au Québec
Dans le contexte actuel au Québec, il existe deux politiques particulièrement intéressantes pour Vigilance OGM soit la nouvelle politique bioalimentaire et la nouvelle stratégie Québécoise sur les pesticides. Vigilance OGM a participé à toutes les rencontres en vue de création de la politique bioalimentaire qui devrait être dévoilée ce printemps 2018. Même si notre demande principale était l’étiquetage obligatoire des OGM, nous avons aussi essayé d’orienter nos demandes pour que l’agriculture québécoise sorte de sa dépendance aux pesticides en favorisant la production biologique.
Manque de volonté politique
Le ministre de l’Agriculture M.Paradis avait annoncé, lors du lancement des consultations de la politique bioalimentaire, vouloir mettre en place l'étiquetage obligatoire des OGM au Québec à l’instar de 64 autres pays dans le monde. Le gouvernement semble encore une fois refuser la transparence aux citoyen·ne·s du Québec en n’imposant pas d’étiquetage sur les aliments contenant des OGM.
Pas d’étiquetage obligatoire des OGM et un plan de croissance peu ambitieux pour l’agriculture biologique dans la politique bioalimentaire du Québec.
Le marché des aliments biologiques constitue le secteur ayant la croissance la plus rapide à l’échelle mondiale. Selon l’Association canadienne pour le commerce des produits biologiques, le marché des produits biologiques au Canada a atteint 3,7 milliards de dollars en 2012 et sa valeur a triplé depuis 2006, ce qui surpasse la croissance des autres secteurs agroalimentaires (1). On s’attendait donc que la nouvelle politique accélère cette croissance tout en répondant aux attendes des consommateur·rice·s. Cependant même si le ministère de l’agriculture (MAPAQ) semble faire le même constat de croissance, leur objectif est de doubler la superficie des cultures biologiques au Québec soit passer de 2,4% en 2015 à 4,8% en 2025. L’ «ambitieux» plan du gouvernement vise 4,8 % dans 7 ans alors que de nombreux pays ont déjà dépassé la barre des 10 % en 2014 (Autriche: 19,4 %, Suède: 16,4 %, Italie: 10,7 % pour ne citer qu’eux) (2).
Il est difficile de ne pas y voir un manque de volonté de notre gouvernement qui peut en partie être expliqué par l’intense lobbying de l'industrie sur les gouvernements, constituant ainsi une menace à la démocratie.
Comme concluait le rapport de la rapporteuse spéciale de l’ONU sur le droit à l’alimentation:
«Il faut une véritable volonté politique pour réévaluer et remettre en cause les intérêts corporatistes, les politiques incitatives et les relations de pouvoir qui maintiennent en place une agriculture industrielle étroitement tributaire de l’industrie agrochimique.» (3)
Pour une agriculture diversifiée
Au Québec, un monopole syndical exercé par l’Union des producteurs agricoles (UPA), un phénomène unique au monde, limite la liberté d’association en agriculture et ne permet pas aux différentes tendances ou conceptions d’avoir voix au chapitre. Sans le rapport de force que permet la pluralité syndical, la liberté de parole et la liberté d’association prévues par la Charte des droits et libertés perdent tout leur sens (4). Les règlements qui régissent l’agriculture au Québec ont permis de faire sortir de la pauvreté de nombreux agriculteur·rice·s québécois·ses. Cependant force est de constater qu’ils ne semblent plus être adaptés à la réalité ainsi qu'aux défis actuels et devraient, par conséquent, être plus flexibles.
La Commission sur l’avenir de l’agriculture et de l’agroalimentaire québécois a rendu public son rapport le 12 février 2008, le Rapport Pronovost (5). Ce rapport fut le résultat d’une consultation historique au Québec dans laquelle plus de 700 rapports ont été déposés. Cependant les recommandations de ce rapport tardent à être mises en place par les gouvernements. Les solutions parfois très simples et peu coûteuses sont déjà connues, il suffit de les mettre en pratiques afin de permettre à l’agriculture biologique de se développer et de donner la possibilité aux jeunes qui souhaitent explorer de nouveaux modèles écologiquement et économiquement viables de s’investir dans cette agriculture.
(1) Canada’s organic market : national highlights 2013. Canada organic trade association, 2013. (en ligne)
(2) IFOAM , Organic Agriculture Worldwide, 2016.
(3) Rapport de la Rapporteuse spéciale sur le droit à l’alimentation, 24 janvier 2017, Conseil des droits de l’homme , A/HRC/34/48.
(4) Briser le monopole syndicale, Perry Bisson , A babord, février /mars 2008. (en ligne)
(5) Commission sur l’avenir de l’agriculture et de l’agroalimentaire, février 2008. (en ligne)